C’est un fait, je n’ai pas du tout volé au Canada (en tant que commandant de bord j’entends). Après donc 3 mois passé chez nos cousins canadiens, je suis donc revenu en France avec un grand sentiment d’amertume aéronautique (heureusement que Marc-Olivier était là pour organiser un rascol New-York !). Cependant, il faut croire qu’au Pôle Nord, le Père Noël est bien renseigné, car pour palier à cette déception, il m’a glissé sous le sapin de noël, à l’intérieur de mes (grands) souliers, un magnifique cadeau : un bon pour un vol d’initiation à la montagne !
Ah là là, quel merveilleux cadeau : depuis tout petit je passais mes vacances à regarder les avions décoller de l’Altiport de Méribel sans me douter qu’un jour, c’était moi qui allait m'envoler de cette belle piste, aux commandes des ces merveilleux avions rouges à skis.
Les fameux avions rouges de Méribel
Je prends donc rendez-vous le … 1er janvier (inutile d’attendre davantage, l’envie de voler passe tellement par-dessus tout). Pendant la nuit du 31 au 1er janvier, je n’ai évidemment rêvé qu’à cette belle journée qui allait m’attendre le lendemain, et qui promettait d’être inoubliable.
1er Janvier : comme à mon habitude, j’arrive à mon rendez-vous aéronautique très en avance, ce qui m’autorise de voir les avions de passage ou en instruction décoller dans le magnifique ciel bleu savoyard.
11h45, je décide de me présenter au club même si je ne suis attendu qu’à midi. De suite, l’atmosphère me plaît : l’ambiance est très sympathique, les pilotes de passages et les membres du bureau se racontent leurs vols et plaisantent.
Un avion rentre de ballade et arrive au sommet de la piste.
Après les présentations d'usage, on me désigne mon instructeur pour ce vol (Jean-Claude de son prénom), qui ne sera ni plus ni moins que le président de l’aéroclub de Méribel ! Nous faisons connaissance, et de suite le courant passe très bien. Je lui décris brièvement mon parcours de pilote et nous nous dirigeons immédiatement vers un petit tableau blanc afin qu’il puisse m’expliquer les grandes différences du vol montagne, surtout au niveau de l’atterrissage sur un altiport : tout est affaire de précision !
L’avion est là, et comme les pleins sont 2suffisants pour notre vol, nous embarquons rapidement, après une visite prévol approfondie, surtout au niveau des « skis » de l’avion. Car la piste de Méribel est toute recouverte de neige l’hiver : les avions sont donc équipés de skis (rétractables si besoin est) et doivent glisser pour pouvoir se déplacer.
Notre avion est le Jodel D140 Mousquetaire F-PNIV (un avion de construction amateur, reconnaissable à son immatriculation en F-Pxxx). A l’intérieur, je suis un peu dépaysé : pas de gyro, pas d’horizon artificiel, le trim et les volets sont actionnables de la main gauche, l’altimètre n’est pas au bon endroit, les sièges sont non réglables, pas de transpondeur… mais je m’habitue vite. Et puis surtout, c’est un avion à train classique et non tricycle comme j’en ai l’habitude. Je fais la remarque à mon instructeur :
« Ne t’inquiète pas, l’avion décollera tout seul. En l’air c’est comme un avion normal » me répond t’il. Ouf, je suis rassuré.
Nous faisons les essais moteurs au sol, très rapidement car il ne faut pas compter sur un quelconque frein pour arrêter l’avion. Le temps de jeter un dernier coup d’œil à la finale (au cas où nous n’aurions pas entendu sur la fréquence un autre avion en train de se poser) puis je mets toute la puissance immédiatement après. L’avion glisse, accélère, et nous fonçons dans la pente descendante pour nous envoler.
90…100…110 km/h, je tire un peu sur le manche : nous voici les 3 skis en l’air et la piste laisse place instantanément au vide de la vallée. Ouahhhhhhhhh, quelles sensations !!!!
Sur les instructions de mon instructeur, je prends un pente de montée jusqu’à 7000ft : l’avion monte, mais il a un peu de peine malgré ses 180CV. En fait, il m’explique que l’avion perd 10% de sa puissance par tranche de 1000m d’altitude perdue par rapport à la mer, et comme nous avons décollé depuis 2000m d’altitude, il ne reste « que » 140 CV au maximum à notre Mouss’. Arrivés à 7000ft, je mets l’avion en palier, mais le badin a du mal à dépasser les 150km/h (encore un effet lié à l’altitude, la vitesse sol est bien plus grande en réalité). Même en palier, la puissance du moteur est au maxi pour essayer de conserver les 150-160km/h.
En direction de la vallée de Valmorel.
Très vite, première leçon : nous allons passer un col. La but de l’exercice consiste d’une part à savoir si l’on va réussir à passer le col (car les effets d’optiques sont traîtres en montagne : on peut croire que l’avion va passer un sommet mais, en fait, il se trouve trop bas) et, dans l’affirmative, de quelle manière il faut le passer (on passe les cols avec un angle horizontal de 45°). En passant le col dit « du Gollet » (merci à l’auto information effectuée par mon instructeur passée sur la fréquence montagne : 130.00), nous basculons dans la vallée de Valmorel. Après un 180°, nous repassons une nouvelle fois ce col (mais en sens inverse) et nous retournons un moment dans la vallée des Bellevilles (St Martin-de-Belleville, Les Menuires, Val-thorens).
Jean-Claude veut alors m’emmener voir quelques chamois (les fameux chamois en carton pâte dont on parle tant sur la Pilotlist [private joke] ). Nous mettons le cap vers les "Dents de la Crosse" et il me demande de récupérer un instant les commandes pour que je puisse mieux les photographier. J’obtempère immédiatement, et je prends mes premières photos en vol. Une fois passé les 2 pics, Jean-Claude bascule en piqué de l’autre côté de la vallée - celui ensoleillé - et je commence à mitrailler … mais les chamois n’étaient pas là (dommage !!!).
La vallée des Bellevilles.
Les dents de la Crosse.
Arrivée à 45° pour passer de l'autre côté. Les chamois sont derrières !
Ah ben non, ils ne sont pas là :-( !
Maintenant, c’est vers Val-Thorens, l’une des plus hautes stations d’Europe, que nous nous dirigeons. Ce sera l’occasion de survoler l’altisurface de la station et de s’essayer à une reconnaissance de la piste. Cette épreuve sera exécutée à presque 8000ft, un record dans ma petite expérience aéronautique !
Val-Thorens. Juste derrière, le parc de la Vanoise.
Allez, il est déjà presque temps de rentrer. Mais avant cela, Jean-Claude voulait saluer un de ses amis, Jojo, patron du restaurant d’altitude « Les crêtes » au sommet de la Tougnette à Méribel. Il me reprend 2 minutes les commandes et effectue un passage bas (mais vraiment très bas...) au dessus du restaurant. Les skieurs, ainsi que ceux qui faisaient bronzette sur la terrasse du resto, ont dû vraiment apprécier…
Un petit peu dépaysé dans l'organisation des instruments.
Entre Val-Thorens et Méribel.
Direction l’altiport de Méribel. Nous sommes à 8000ft, le tour de piste est à 6500ft, nous descendons plein réduit pour survoler notre terrain et en faire la reconnaissance réglementaire. Pour une fois, l’aiguille du badin daigne dépasser les 160km/h. La manche à air indique qu’il n’y a pas de vent et j’effectue mon étape de vent arrière en préparant la machine. Jean-Claude m’aide un peu dans mes repères visuels et pour prendre la décision d’entamer l’étape de base. J’effectue celle-ci sans perdre d’altitude (encore une différence par rapport à un terrain de plaine) et je m’engage dans la finale. Comme la piste de Méribel est assez peu pentue, je ne suis pas trop leurré pour atteindre mon point d’aboutissement. Mon plan est bon, j’essaye de tenir les vitesses du mieux que je peux. En courte, J.-C. reprend les commandes (et je reprends mon appareil photo pour shooter). Le toucher des skis se fait à mi-piste et l’avion décélère assez rapidement. Il faudra même remettre un peu de gaz pour atteindre le sommet de la piste et le point de stationnement.
En finale à Méribel.
Voilà pour ce super vol ! A la descente de l’avion, nous avons rempli les papiers de l’avion, et j’ai pu inscrire 30min de vol sur mon carnet de vol (pourtant, il m'a semblé beaucoup plus long). Pour finir, nous avons beaucoup discuté de l’intérêt pour un citadin lyonnais de passer la qualif. montagne ou de site.
Vous pouvez me croire, j’ai énormément savouré ce vol : d’une part parce qu’il s’agissait ici d’une nouvelle expérience, d’autre part parce qu’il est peu probable que je refasse un vol montagne de sitôt (à cause de l’année qui s’annonce très chargée en travail, et les finances qui risquent d'avoir du mal à suivre ……). Mais en tous cas, le vol montagne - à l’aéroclub de Méribel qui plus est - donne vraiment envie un jour de persévérer dans cette branche de l’aéronautique.
Désolé, j'avais bien mon GPS avec moi, mais j'ai oublié de l'allumer !
Aurélien