Lorsque Lucas m'a demandé de préparer la nav pour l'Alpe d'Huez, ma réaction immédiate et spontanée a été de m'exclamer : "Déjà ?". J'avais en effet souvent vu des photos de l'altiport de l'Alpe d'Huez, sans y avoir jamais mis les pieds (ni par les airs, ni par les terres) et donc, pour moi, l'Alpe d'Huez me semblait faire partie des altiports classés "difficiles" : je ne m'imaginais donc pas y poser mes roues aussi tôt dans ma formation.
Nous décollons encore de bonne heure ce matin : pour ce 3e vol, je sais décoller tout seul de Méribel. Le temps de prendre un peu d'altitude, je mets le cap droit devant, vers Brides-les-bains. Puis cap dans la vallée des Belleville (Les Menuires, Val-Thorens) que je traverse perpendiculairement en faisant attention aux trafics denses dans le coin. J'ai suffisamment d'altitude pour passer la première grande muraille de roche sur mon chemin, celle qui me permettra de basculer dans la vallée de la Maurienne.
Lucas oublie alors quelques temps son rôle d'instructeur pour prendre la casquette de guide de haute montage : "tu vous là-bas à droite, c'est le col de la Madeleine" ou encore "et là-bas, devant à gauche, c'est le célèbre col du Télégraphe avec son fort"... Que de lieux mythiques connus 'de nom' grâce au Tour de France (cycliste) mais que j'étais incapable de localiser avant... C'est fou ce que je me suis amélioré en géographie depuis que je pilote !
Nous nous engouffrons maintenant dans une vallée, formée à droite par la chaîne de Belledonne et à gauche par le massif des Grandes Rousses : normalement, nous devrions tomber sur un grand lac artificiel ... enfin "normalement". C'est vrai qu'à un moment, j'ai hésité à m'enfiler dans cette vallée, car "la bonne vallée" aurait tout à fait pu être celle d'à côté, celle de droite comme celle de gauche... Et puis finalement, je suis rassuré en voyant mon étendue d'eau, que ma carte nomme comme étant "le lac de Grand-Maison".
Passé le lac, nous approchons le point N de l'Alpe d'Huez, alors il faut perdre toute cette altitude accumulée depuis Méribel. Point de salut, il faut faire des spirales entre deux pans de montagne. Et puis nous nous annonçons à Huez, nous faisons la reconnaissance puis effectuons vent-arrière (je dis "nous" car, comme d'habitude, je suis à la ramasse dans cet environnement qui ne m'est pas familier). Pendant le circuit, je demande quelles sont les consignes pour gérer l'arrondi sur une piste si pentue : en fait, pas de réduction sur cet altiport : on maintient le régime moteur utilisé en finale tout en arrondissant, jusqu'au toucher des roues. Au moment de l'impact, réduction totale, puis de nouveau des gaz pour gérer la montée de l'avion jusqu'en haut de la piste.
De nouveau, je ferai 3 tours de pistes sur l'altiport, à chaque fois bien aidé par Lucas (normal, ce n'est que mon 3e vol...), et puis nous rentrerons. Sur le retour, alors que je m'annonce passer le col du "Saint Perron des Encombres", nous entendons un pilote lancer sur les ondes un "Amen". Au début, nous n'y faisons pas attention ; c'est seulement de retour à Méribel que Jérôme, le chef pilote du club, nous apprend revenir lui aussi à l'instant de vol, qu'il nous avait entendu sur les ondes et qu'il nous avait ainsi rétorqué ce "Amen" parce que le "Grand Perron des Encombres" n'avait rien de "Saint" !
Aurélien